« La folie, c’est de faire toujours la même chose et d’attendre un résultat différent » : repenser l’enseignement des langues
- Gaëlle Miani

- 7 déc.
- 3 min de lecture

On attribue souvent à Albert Einstein cette phrase devenue célèbre :« La folie, c’est de faire toujours la même chose et d’attendre un résultat différent. »
Qu’on parle de physique, d’innovation… ou d’enseignement des langues, cette citation frappe juste. Elle met en lumière un paradoxe que l’on observe encore trop souvent à l’école :
👉 on veut de meilleurs résultats,
👉 on veut des élèves motivé·es,
👉 on veut des compétences durables,
… mais on continue d’utiliser les mêmes méthodes qu’il y a 30, 50, parfois 100 ans.
Et ensuite, on s’étonne que cela ne fonctionne plus.
Les vieilles méthodes ne correspondent plus au monde d’aujourd’hui
Nous vivons dans un monde où les langues sont partout : dans nos séries, nos réseaux, nos collaborations internationales, nos voyages, nos échanges quotidiens. Pourtant, dans énormément de classes, on enseigne encore les langues comme si l’objectif était de remplir des cahiers d’exercices ou de réussir un test.
Le problème n’est pas le manque de moyens. Ce n’est pas un nombre insuffisant d’enseignants.Ce n’est pas un manque d’heures.
Le problème, c’est de continuer à faire plus de la même chose, en espérant un résultat différent.
Même financement, même programmes, mêmes réflexes pédagogiques… et toujours les mêmes difficultés :— élèves démotivés,— faible transfert vers la vraie vie,— stress lié à l’erreur,— manque d’authenticité dans la pratique.
Plus de ressources injectées dans un système qui n’est pas repensé… ne change pas le système.
Pourquoi ça ne fonctionne plus ?
Parce que le monde a changé, les besoins ont changé, et les cerveaux apprennent différemment lorsqu’ils sont sollicités dans un environnement riche, relationnel, contextualisé et émotionnellement sécurisé.
Aujourd’hui, on sait que :
la motivation extrinsèque (notes, pression, objectifs imposés) ne tient pas dans le temps,
la répétition mécanique n’entraîne pas une vraie compétence communicative,
l’enseignement frontal laisse peu de place au cerveau de l’apprenant,
le stress bloque l’apprentissage,
l’erreur est une donnée indispensable… mais encore trop stigmatisée.
Bref : continuer comme avant ne peut pas produire autre chose que les résultats d’avant — souvent insuffisants.
Ce qu’il faut changer : passer d’enseigner la langue à enseigner avec la langue
Alors, que faire ?
Changer de paradigme.
Plutôt que de multiplier les heures, les exercices, les corrections et les évaluations, il est temps de se concentrer sur :
1️⃣ L’apprentissage actif et signifiant
Projets, tâches réelles, communication authentique, choix des apprenant·es.
2️⃣ La relation comme moteur pédagogique
Ce qu’on apprend dans un climat de confiance est appris plus vite, mieux… et reste plus longtemps.
3️⃣ L’accompagnement plutôt que la transmission
L’enseignant devient facilitateur, coach, guide.On ne “remplit” plus les apprenant·es, on les active.
4️⃣ La plasticité cérébrale comme boussole
Comprendre comment le cerveau apprend change tout : le rythme, la répétition, l’engagement émotionnel, la sécurité affective, les pauses, les objectifs.
5️⃣ L’autonomie et la responsabilisation
Apprendre n’est pas subir.C’est choisir, organiser, ajuster, réfléchir. Et cela s’enseigne.
Plus d’argent ne suffit pas. Plus de personnel ne suffit pas. Plus de la même chose ne suffit pas.
Les systèmes éducatifs tentent de résoudre des problèmes profondément structurels en ajoutant des couches :de nouvelles règles, de nouvelles heures, de nouveaux acteurs… Mais tant que le modèle reste le même, les résultats aussi resteront les mêmes.
La vraie question n’est pas :« Comment faire plus ? » mais :« Comment faire autrement ? »
Repenser l’enseignement des langues, c’est accepter de sortir du mode automatique
Cela demande du courage, de la créativité, de la formation continue et un vrai changement de regard :
passer de l’erreur comme faute à l’erreur comme étape,
passer du manuel comme maître au manuel comme ressource,
passer de l’enseignant·e qui sait à l’enseignant·e qui accompagne,
passer du cours identique pour tous au parcours adapté à chacun·e.
Ce n’est qu’à ce moment-là qu’on cessera de répéter les mêmes erreurs, et qu’on commencera à voir des résultats réellement différents.
Et vous ?
Quelles sont les « vieilles habitudes » de l’apprentissage ou de l’enseignement des langues que vous pensez qu’il est temps de laisser derrière nous ?




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